M a m a t r e s c e n c e

M a m a t r e s c e n c e

J’ai beaucoup d’admiration pour les personnes qui réussissent à tenir un blogue, avec des propos cohérents et organisés, sur une base régulière. Je dois me rendre à l’évidence, écrire le blogue de Marées me prend beaucoup plus de temps que je pensais. 


De mon côté, j’écris depuis toujours, pour moi. Mais écrire des choses qui sortent de mes petits cahiers perso, c’est une autre histoire. J’imagine que je vais finir par trouver mon flow et je me laisse le temps. 


Trouver le bon ton aussi je trouve ça challengeant et j’en avais parlé dans l’article précédent. Je me demande souvent si j’ai “le droit” de parler de maternité. Après tout, je ne suis ni une professionnelle de la santé… ni une sage-femme… ni une thérapeute…ni une professionnelle en allaitement. Je suis juste une Mom


Alors, je me lance, en toute humilité et avec ce désir toujours ardent d’écrire et de partager. 


Aujourd’hui, on parle de matrescence, de 4e trimestre et de l’ambivalence des émotions lorsqu’une femme devient maman. 


Et de ce qui m’a aidée à y voir plus clair dans ma maternité. 


Oui ! Parce que si tu es déjà maman, tu sais probablement déjà. Si tu es enceinte, tu commences probablement déjà à ressentir que les émotions sont un peu variables ? 


D’accord, les hormones y sont pour quelque chose. Mais aujourd’hui, je parle de transformation au sens plus global. 


Quelques jours après avoir donné naissance, ma sage-femme a déposé cette phrase comme un baume sur mon coeur : 


“Tu fais maintenant parti de celles qui savent”. 


Cette phrase… je fais partie de celles qui savent. 


Une phrase si forte qui résonne encore dans mon cœur de nouvelle maman depuis les tout premiers moments. 


Une phrase qui rappelle que c’est quasi impossible de comprendre ce que l’on va vivre en devenant maman, avant de le vivre. 


Une phrase qui souligne que nous ne sommes pas seules dans cette aventure. Qu’en donnant la vie, nous devenons toutes interconnectées par cette aventure transformatrice du corps et de l’âme. On devient membre d’une “meute”: Les Mamas.


Ce n’est pas évident de savoir quel genre d'informations on aura besoin avant de donner naissance ou une fois dans le feu de l’action. 


“Qu’est-ce qui me guidera et m’éclairera ? Qu’est-ce qui aura une influence positive sur mon cheminement ? …ou au contraire me nuira ?”


Je viens justement de faire une formation sur le 4e trimestre avec l’incroyable Ingrid Bayot dans laquelle elle parlait du fait que le “postpartum, on en parle peu ou on en parle avec des stéréotypes ou des extrêmes”. Le discours est soit “Rose bonbon” ou “Noir d’encre”. Et je suis tellement d’accord avec elle.


Et en y réfléchissant justement et en vivant la maternité, j’embrasse l’idée que les émotions et les états d’âmes que nous ressentons en tant que nouvelle maman constituent un Tout. 


Que ce n’est pas tout rose ou tout noir. Toutes les émotions se rencontrent et coexistent dans ce Tout extraordinaire. 


Et NOUS sommes extraordinaires de vivre ça !


Avec le chemin que j’ai fait à travers ma propre maternité les deux dernières années, ce que je comprends, c’est que j’aurais aimé qu’on me parle du 4e trimestre, de ce qu’on peut ressentir en postpartum. 


Et surtout de la matrescence et de l’ambivalence des émotions. 


De ce Tout parfois chaotique qui fait osciller entre des moments sombres et difficiles et des instants d’amour et de pur bonheur. 


De la normalité à ressentir cette polarité. 


De la normaliser, sans la banaliser. 


Selon la description qui figure dans le petit ebook gratuit de Ça va maman ? (si tu ne l’as pas lu, je t’invite à le télécharger, c’est de l’or (LIEN au bas du texte): “La matrescence est la contraction des mots maternité et adolescence pour expliquer la naissance d’une mère. C’est le processus que vit une femme au moment de devenir mère, que ce soit sur le plan physique, social émotionel, neurobiologique ou hormonal. La matrescence souligne le cheminement normal d’une femme dans la maternité sans associer les boulversements psychologiques à un trouble psychopathologique, etc.”


Je ne sais pas comment a été ta matrescence (ou comment sera la tienne si tu es enceinte), mais la mienne a été bouleversante. Pleine d’émotions contradictoires, pas toujours confortables.

Je pouvais passer de la colère à la plénitude, de la tristesse au pur bonheur, de l’amour inconditionnel à de la rage même (allô Mom Rage). Je me sentais coupable d’être dans cet état. J’avais honte de ressentir tout ça autour de mon bébé tout rose, tout droit sorti de l’univers des licornes-rose-bonbon. 


J’étais en deuil de ma vie d’avant. De la femme d’avant. 


Je revivais aussi des bouts de mon enfance. Des choses moins roses que je n’avais jamais exprimées, des émotions que je ne reconnaissais pas. Ça criait en dedans. 


À cause de tous ces changements et ces prises de conscience, mes relations avec mes proches étaient parfois tendues. 


Ma fatigue, tant physique que psychologique, était importante et j’ai même pensé que j’avais un trouble psychologique plus grave. Je me sentais instable et en perte de repères. 


Je me sentais comme sur un bateau qui a perdu ses voiles et qui vogue au gré des courants et de la météo, sans avoir de contrôle sur les éléments. 


Pas reposant et super déstabilisant.


Ce que j’ai compris plus tard, c’est que je souffrais de ne pas pouvoir nommer ce qui était en train de m’arriver. D’être en pleine matrescence ! Sans le savoir. 


C’est important pour moi de souligner ici que si on retourne à la définition de Ça va maman?, ça dit que ce cheminement de la matrescence est “normal” et non pathologique. 


Par contre, si tu as des doutes sur ta santé mentale, que tu te sens déprimée plus que ce que tu considères “normal”, ou complètement submergée, que tu t’inquiètes pour toi, ta vie de famille, va chercher de l’aide. Consulte, parle-en, ne reste pas dans l’ombre. Je vais laisser des ressources en bas du texte. 


Si tu es enceinte, peut-être que c’est trop aussi pour toi de lire ça maintenant. Peut-être tu auras envie d’y revenir plus tard. Ou pas. Chaque aventure est si différente. 


Certains évènements m’ont aidée à prendre conscience de ce qui se manifestait et se transformait en moi. (fiou !)


Ce qui m’amène à te parler de Laura Clery.


Si tu ne connais pas Laura Clery, ce qu’elle fait est globalement humoristique et elle a une large communauté sur les réseaux sociaux. Elle est aussi l'auteure  de "Idiots. Mariage, Motherhood, Milk & Mistakes". 


Quand elle a donné naissance pour la 2e fois, elle voulait faire une vidéo humoristique sur le 4e trimestre, mais ça n’a pas été possible. Elle ne trouvait pas ça drôle finalement, le 4e trimestre. 


Dans sa vidéo, elle parle de ses difficultés en postpartum, celles dont on parle moins (ou dont on ne parle pas). De l’ambivalence des émotions. De cette transition intense que vit une femme qui donne naissance. Et elle ne mâche pas ses mots. Elle va droit au but !


Quand j’ai regardé sa vidéo sur le 4e trimestre, ma fille n’avait que quelques mois. 


Ça m’a chamboulée. 



Je me rappelle avoir d’abord ressenti du malaise de voir Laura Clery raconter les détails de sa vie intime sur les réseaux sociaux. Je ne comprenais pas comment elle pouvait vivre ses émotions de manière authentique en se filmant et en exposant sa réalité à des milliers de gens? (j’allais beaucoup moins sur les RS dans ce temps là… now, I get it et sérieux, je lui dis MERCI !).


Et pourtant, j’étais réellement absorbée par son contenu. D’une part parce que ce qu’elle vivait me déstabilisait et d’autre part parce que je pouvais complètement m’y identifier. J’étais en train de comprendre que je minimisais depuis bien longtemps mes propres émotions et que j'enfouissais l’intensité de tout ça dans une petite case, pour fonctionner et être une “bonne” mère. Une mère forte. 


Mais Laura, elle, faisait exister son malaise au grand jour et pour moi, ça a été super libérateur. 


Dans la vidéo, elle commence en disant : “They told me I would feel bliss the moment she was born. I didn't. I was still shaking from the pain. I was actually angry that it wasn't the euphoric moment I had been promised. The high wasn’t there, just the pain”. 


Juste ça !


Être en colère de ne pas avoir les émotions qu’on pensait avoir. Des émotions qu’on s’impose avoir même d’avoir la chance de vivre ce qu’on a à vivre.  


“It’s like I’m sitting across from the room, looking at myself watching me go insane. Shifting from positivity to morbidity with the change of a diaper.” 


“No one told me it would be this hard. No one told me I could love this hard”.


TOUT ce que Laura Clery nommait dans cette vidéo résonnait en moi et tranquillement défaisait les nœuds de mon propre mal être. 



C’est fou hein, mais elle était la première femme que je voyais en postpartum parler de l’intensité de la polarité de ses émotions et “crier” haut et fort que des fois, c’est beau, des fois, non. Point. Qu’il n’y a pas lieu d’avoir honte, que tout passe et qu’on peut tout surpasser. 


Petite anecdote à ce sujet : Quelques minutes après avoir donné naissance, mon mari a filmé une scène où ma fille est dans mes bras. Encore assise sur mes talons, essoufflée de tout ce que je venais de donner (4 heures de poussée sans péri et en contractions durant 36 heures), je la tiens contre mon cœur et j’ai l’air complètement shootée à l’adrénaline. J’ai peur de faire une hémorragie. J’ai peur de devenir mère. Trop tard. C’est fait. Je suis mère. Je suis là, elle est là et je la connais depuis toujours et pourtant, nous savons toutes les deux que nous sommes étrangères dans cet univers extra-utérin. Je l’aime, mais je suis terrorisée par son arrivée. 


J’ai regardé cette scène surement 100 fois dans les premiers mois de sa vie. Je me suis sentie longtemps coupable de ne pas avoir pleuré quand ma fille est née. De ne pas avoir senti le love super puissant dont tout le monde parle me submerger. Coupable de ne pas être calme, de dire des choses étranges comme qu’elle pleurait fort et qu’on allait déranger les voisins (aucun sens, je blaguais, mais je me trouvais pas drôle). 


Je ris maintenant. Je suis capable de le regarder avec douceur envers moi-même. Envers ma fille et envers notre aventure.  


On ne m’avait pas dit que ça se pouvait que je ne pleure pas. Que je serais peut-être déconnectée de cette expérience parce que c’était toooo much en même temps pour moi. Que ça me prendrait du temps pour me déposer dans ma maternité. Qu’il faudrait que j’apprenne mes émotions. Que je devrais m’adapter. Que je pouvais ressentir de la tristesse. Que je sois en deuil de ma vie d’avant. Et que c’est normal. 


Laura Clery a aussi dit : 


“I wish more people talked about the ups and down of parenting. What it’s really like. Maybe the shame and guilt would lessen if we all openly acknowledge how hard it really is and gratifying and painful and blissful and excruciating and exhilarating and frustrating and fun… it really is”.


“…Not stay silent”. 


Alors voilà. 


Avec du temps, l’aide d’une psychologue, d’un village immense et d’un réel intérêt de comprendre ce qui m’habitait, mes émotions sont devenues d’excellentes enseignantes. 


Ma fille est devenue ma meilleure professeure. 


Quand je dis “village”, je parle de toutes les personnes que j’ai choisies pour m’accompagner dans cette aventure. De tous les ateliers que j’ai fait. De tous les podcasts que j’ai écoutés. De mes lectures, de ma communauté. Etc. 


Je suis consciente que j’ai donné naissance dans un contexte hyper particulier où la perception de l’isolement était à son apogée avec la pandémie. Et j’ai parfois de la difficulté à comprendre si mon expérience aurait été différente sans la pandémie tellement je n’étais juste pas outillée. 


Par contre, je sais que la détresse que les nouvelles mamans ressentent est assez répandue… pandémie ou pas. 


Et j’aimerais apporter de la lumière sur tout ce qui vient de se dire. Parce que la définition de la matrescence, elle est tellement belle et importante pour normaliser (et non banaliser) la gamme d’émotions qu’une nouvelle maman peut ressentir durant cette grande transition. 


“ On ne dit pas assez aux mères que lors d'un accouchement, il y a deux naissances; celle de votre enfant. Et la vôtre aussi “. (Ça va Maman ?) 


Je ne pense pas que j’aurais pu savoir avant de “faire partie de celles qui savent”. Et j’espère aussi que devenir mère n’est pas obligé d’être douloureux. Et si ça l’est, parlons-en. 


Donnons-nous de l’amour (moins de culpabilité et de honte). 


Devenir maman, c’est devenu pour moi l’opportunité de me (re)définir. 


Et c’est là toute la beauté je trouve dans le fait de devenir mère. C’est de se donner le droit de se demander qui on est. À nouveau ou pour la première fois. Et d’ouvrir les valves de l’amour. 


D’embrasser toutes nos polarités, toutes les versions et les parties de soi. De s’accepter dans toute la gamme d’émotions que l’on peut ressentir. De célébrer ce nouvel archétype de la Mère. D'observer aussi ce qui résonnent moins en nous. 


Choisir. Se choisir. 


Voilà, je vais m’arrêter ici pour le moment. 


Je veux d’ailleurs dire un merci à Ça va maman ? pour leur podcast qui m’a permis d’entrer en relation avec mes émotions et de connecter avec les récits d’autres mamans. D’être sortie de l’ombre. Merci d’avoir parlé de matrescence 🙌🏻. 


Merci aussi aux femmes comme Laura. Qui n'ont pas peur de montrer leurs parties plus sombres. Pas juste le rose bonbon. 


J’ai tellement de gratitude pour les personnes que je croise sur mon chemin depuis le début de cette aventure. 


Je ne sais pas si ce texte fait du sens pour toi, Mama. Que ta réponse soit oui ou non, si tu as envie de nous écrire, on a toujours envie de te lire et de connecter avec toi (Contact). 


La prochaine fois, j’ai envie de te parler des 5 astuces qui m’ont permis de me réinventer et de me (re)trouver. De vivre ma matrescence dans une forme qui a fait du sens pour moi. 


À mon rythme… bientôt. 


M E R C I  🤲🏻. 

 

Fière d'être "Juste une Mom": Article ici 

Ça va maman ? : www.cavamaman.com

E-book sur la matrescence : https://www.cavamaman.com/ebook-matrescence

Laura Clery, 4e trimestre : https://youtu.be/kurYAhxZ4xc

Ordre des psychologues : https://www.ordrepsy.qc.ca/

Ligne Parents : https://www.ligneparents.com/LigneParents


Love, 


Jeanne